- La Forêt de Soignes s’étend sur une superficie de plus de 5.000 ha répartie sur les trois Régions.
- Le nom ‘Soignes’ viendrait de la rivière ‘Senne’ qui longeait jadis la forêt.
- Si c’est la ‘hêtraie cathédrale’ qui a fait sa réputation, ce sont ses paysages variés composés de drèves majestueuses, de milieux ouverts, de plans d’eau et de sites historiques qui forment aujourd’hui sa richesse.
- La forêt fait partie du réseau européen Natura 2000 parce qu’elle abrite des habitats protégés et des espèces rares telles que la bouvière, le lucane cerf-volant et certaines chauves-souris.
- Les zones les plus sensibles de la forêt sont les réserves naturelles, forestières ou archéologiques. Elles font l’objet d’une accessibilité limitée et d’une gestion adaptée.
- Les réserves forestières intégrales caractérisées par leurs arbres exceptionnellement vieux et leur riche biodiversité sont à ce point uniques qu’elles sont reprises au patrimoine mondial de l’UNESCO.
- La gestion de la Forêt de Soignes est certifiée durable. Le but de cette gestion est de transmettre ce patrimoine naturel exceptionnel aux générations futures.
- La forêt de Soignes vous offre plus de 350km de chemins piétons, cyclistes et cavaliers. Des ‘zones de jeux’ permettent aux enfants de se défouler librement. Des espaces de ‘chiens en liberté’ sont prévus. En bref, la forêt s’ouvre à chacun. Prenez en soin !
La Forêt de Soignes, c’est bien plus que le plus grand espace vert de la Région bruxelloise, la plus grande forêt de feuillus de Flandre et la hêtraie la plus extraordinaire de Belgique. C’est une ancienne forêt, riche d’une histoire exceptionnelle et très bien documentée. C’est un paysage dont l’état de conservation est unique et qui date de la fin de la dernière glaciation, doublé d’un écosystème particulier abritant une faune et une flore étonnamment riches pour une forêt urbaine. Cette oasis verte située en partie sur le territoire de la Région bruxelloise, qui compte plus d’un million d’habitants, est accablée par une pression récréative intensive, mais aussi par la pollution de l’air et de l’eau, ainsi que par les effets du changement climatique qui menacent son équilibre écologique. La Forêt de Soignes remplit trois fonctions importantes : écologique, sociale et économique. Les fonctions écologiques et sociales (et paysagères) ont aujourd’hui surpassé la fonction économique.
Les menaces et ces trois fonctions sont au centre des nouveaux plans de gestion forestière pour les décennies à venir. Une forêt séculaire doit en effet être gérée avec une vision à moyen et long terme. Le schéma de structure crée un cadre interrégional pour coordonner des objectifs communs et pour les réaliser de façon cohérente sur le plan récréatif et écologique. C’est une réponse à un besoin d’aborder de manière transfrontalière des défis et des problèmes qui sont communs. Cela a un impact important sur la gestion de la forêt dans son ensemble.
La Forêt en chiffres
La Forêt de Soignes s’étend sur une superficie totale de quelque 5.000 hectares ! Le hêtre y occupe une place prépondérante puisque cette essence couvre près de 2.650 hectares, soit plus de la moitié de toute la forêt. En outre, un nombre exceptionnellement élevé de grands arbres y pousse. On compte en moyenne 5 arbres d’un diamètre supérieur à 80 cm par hectare !
Les trois Régions fournissent des efforts comparables pour protéger la nature, préserver et revaloriser le patrimoine biologique, paysager, géologique, pédologique, archéologique et architectural. Ensemble, elles sont à l’origine de la reconnaissance européenne de grandes portions de la forêt comme zone Natura 2000. On y trouve trois réserves forestières intégrales : Grippensdelle (83 ha) en Région bruxelloise, Joseph Zwaenepoel (232 ha) en Région flamande et Ticton (23,5 ha) en Région wallonne. Dans ces réserves, la forêt peut se déployer librement, sans intervention humaine. Ces réserves forestières ont été reconnues comme patrimoine mondial de l’Unesco le 7 juillet 2017.
Attention à la vulnérabilité de la Forêt
Au cours de son histoire, la forêt a subi de nombreux changements liés aux évolutions sociales. Il reste aujourd’hui quelques fragments de la Forêt Charbonnière originale, remontant au temps des Romains, qui englobait alors non seulement la Forêt de Soignes, mais aussi le bois de Hal et le bois de Meerdael. Pour éviter qu’elle soit davantage fragmentée, la Forêt de Soignes a été classée en 1959, par un arrêté de «classement comme paysage». Les gestionnaires forestiers se penchent par ailleurs sur d’autres problèmes ayant un impact sur la forêt, tels que le trafic motorisé, diverses formes de pollution, etc. Les mesures de gestion de ces 20 dernières années ont permis de réduire en grande partie l’impact de ces problèmes, qui n’ont pas été oubliés dans les plans de gestion établis pour l’avenir.
Nouveaux plans de gestion
Les nouveaux plans de gestion de la Forêt de Soignes (un par région) sont établis à moyen terme (de 20 à 24 ans). Ils décrivent les limites des zones Natura 2000, les toutes dernières visions au niveau de la gestion forestière, les effets attendus du changement climatique et l’exécution de mesures qui ont été intégrées dans le schéma de structure interrégional. On retrouve les lignes de force suivantes dans les plans de gestion des trois Régions:
· Améliorer et augmenter la valeur naturelle afin de défragmenter la forêt (reconnecter les fragments de forêt), augmenter la richesse en essences, améliorer la structure forestière, laisser plus de bois mort sur pied et couché (pour servir d’habitat aux insectes, aux champignons, aux oiseaux et bien d’autres organismes), et porter un intérêt particulier à la faune et la flore spécifiques.
· Renforcer les défenses de la forêt face aux effets attendus du changement climatique, tels qu’une sécheresse extrême au printemps, des hivers très humides, des orages violents et une augmentation du nombre de fortes tempêtes.
· Trouver un équilibre durable entre loisirs, protection de la biodiversité et exploitation forestière.
· Augmenter la connaissance de la forêt.
· Préserver les qualités paysagères, ainsi que le patrimoine géologique, archéologique, pédologique et architectural.
Tous ces aspects sont étroitement liés ; ils s’influencent mutuellement de façon complexe. Les paysages typiques, comme la hêtraie cathédrale, sont partiellement maintenus. Les clairières, les plans d’eau et les lisières font l’objet d’une attention accrue. L’aspect de la forêt va changer lentement mais sûrement, pour devenir plus mélangé et stratifié, plusieurs drèves vont être rénovées et certaines parties de la forêt feront l’objet d’une gestion moins intensive ou ne seront plus gérées du tout, afin de favoriser des processus spontanés et naturels. Le Chêne sessile, de même que d’autres essences plus rares, telles que le Charme et le Tilleul à petites feuilles, seront plantés en plus grand nombre ou auront davantage l’occasion de connaître une régénération spontanée. Grâce à la régénération naturelle d’essences indigènes, la forêt connaîtra un rajeunissement là où c’est nécessaire. La devise des gestionnaires forestiers est d’imiter la nature, et de guider ou d’accompagner la dynamique naturelle.
Sylviculture
Les nouvelles priorités dans la forêt
Les fonctions récréatives et écologiques des forêts n’ont cessé de gagner en importance ces dernières décennies en Europe occidentale, et à juste titre. De ce fait, la fonction économique, qui repose sur la production de bois, a un peu régressé. D’aucuns pensent qu’une forêt pousse toute seule et ne nécessite aucune gestion. C’est vrai, mais une évolution spontanée de la forêt présente plusieurs inconvénients. C’est ainsi que les clairières se referment et que les plans d’eau s’assèchent. Les drèves disparaissent ou deviennent méconnaissables, les arbres morts et instables représentent un danger pour les visiteurs et suite à la prédominance des espèces sciaphiles (qui recherchent l’ombre), les autres espèces, héliophiles (qui recherchent la lumière du soleil), sont sans cesse évincées. Sans intervention humaine, le hêtre devient prédominant un peu partout dans la forêt, surtout maintenant que cette essence connaît une régénération spectaculaire et abondante. Cela signifie à moyen terme la fin du chêne, des conifères et autres essences héliophiles, et donc un appauvrissement des essences. Ce qui n’est pas sans conséquence sur la diversité des espèces au niveau de la couche herbacée et buissonneuse.
Lors des abattages, on obtient de la matière première renouvelable et durable. C’est important pour contrôler la composition des espèces et la quantité de lumière qui pénètre à l’étage secondaire (couche arbustive moyenne), dans la couche buissonneuse et la couche herbacée.
Le label FSC valable pour les parties flamande et bruxelloise de la forêt, ainsi que le label PEFC en vigueur sur le territoire wallon, renforcent positivement la gestion durable du site. Cela signifie que le bois extrait de la forêt est certifié durable et que dans le commerce, il est reconnu comme étant produit de façon durable.
Une forêt dynamique
Depuis le début du 21e siècle, les très bonnes années de semences pour le hêtre se sont multipliées. Ce phénomène, combiné à d’autres facteurs moins évidents, fait que cette essence connaît une régénération massive depuis 2005, pour la première fois de mémoire d’homme, et colonise la couche arbustive et l’étage secondaire. Juste au moment où cette régénération naturelle se produit, plusieurs scientifiques s’interrogent sur le rôle que peut encore jouer le hêtre en Forêt de Soignes au 21 e siècle, étant donné sa sensibilité aux effets du changement climatique (printemps plus secs, vagues de chaleur en été et hivers plus humides).
En raison du changement climatique et des objectifs écologiques, on aimerait évoluer vers une forêt plus mélangée. L’objectif à long terme est d’arriver à un mélange d’essences indigènes, avec toutes les espèces de buissons et de plantes que l’on peut attendre naturellement à ces endroits. On assiste ainsi au développement d’une forêt qui, non seulement est moins sensible aux maladies et aux effets des fortes tempêtes, mais résistera mieux aussi au changement climatique. La forêt devient donc plus robuste.
C’est un travail de longue haleine, dans lequel le rôle du gestionnaire forestier est crucial.
La gestion entend stimuler et accélérer au maximum les processus naturels, par le biais d’éclaircies et de plantations, et en récoltant les fûts individuels au lieu de procéder à des coupes à blanc de grande envergure. On a opté pour un changement d’essences ou un enrichissement avec des espèces qui sont rares pour l’instant mais sont adaptées, notamment par rapport au changement climatique. Les objectifs majeurs visent à augmenter la part de bois mort, à favoriser une forêt plus ouverte et plus lumineuse pour permettre les mélanges et réduire les zones équiennes, à créer des lisières et des clairières plus larges, à éviter, réduire voire exclure les perturbations et la pollution. La gestion forestière a évolué avec le temps. Se battre “contre” la nature ne fait plus partie du vocabulaire du gestionnaire forestier. Son leitmotiv est désormais d’imiter la nature, de guider et accélérer son travail.
Regénérer la forêt
Les arbres ne sont pas éternels, même si les gestionnaires forestiers ont tendance à sous-estimer leur longévité. Il n’est pas toujours vrai qu’un hêtre décline une fois qu’il a deux cents ans et les chênes peuvent vivre plus vieux encore. Pourquoi donc envisager déjà une régénération si les arbres les plus anciens n’ont pas encore atteint leur âge maximum ? Cette décision est dictée par plusieurs considérations :
• A l’heure actuelle, la forêt se compose toujours en grande partie de peuplements forestiers homogènes et équiens. Cela signifie qu’une essence domine (généralement le hêtre) et que tous les arbres d’une parcelle ont le même âge. Les tempêtes de 1990 nous ont fait prendre conscience que ce n’était pas une situation stable, surtout lorsque les arbres deviennent vieux et très grands, avec une petite couronne. Le gestionnaire forestier veut remédier à cela. Pour ce faire, il faut procéder à une régénération mais pas par de grandes coupes à blanc. Il est préférable de procéder à une régénération à petite échelle pour obtenir à long terme une forêt mélangée, inéquienne et non homogène, avec une plus grande stabilité et une plus grande biodiversité. La gestion forestière devient donc plus dynamique.
• Autre facteur qui entre en ligne de compte : on n’a pas partout l’essence voulue. Si l’on veut par exemple plus de chênes (sessiles) dans la forêt, il faudra les planter parce que les arbres semenciers de cette essence sont rares et qu’il est difficile pour les semis de s’établir spontanément. Il en va de même pour le tilleul et pour certaines espèces plus rares comme le Poirier sauvage et le Pommier sauvage, l’orme, le Peuplier tremble et toute une série de buissons qui n’ont pas eu l’occasion de se développer durant cette longue période où la hêtraie est restée sombre.
Pour régénérer la forêt selon une gestion dynamique, quelque 50 hectares de jeunes arbres devraient germer ou être plantés chaque année. La préférence va à la régénération naturelle issue de la germination spontanée de semences produites par la forêt. Ce type de régénération est bon marché, donne un aspect naturel et se fait généralement massivement, après quoi le gestionnaire forestier a l’embarras du choix quant aux individus qu’il veut favoriser, si nécessaire. Planter soi-même est plus coûteux mais présente l’avantage que le gestionnaire peut choisir l’essence et ne doit donc pas s’en remettre au ‘bon vouloir’ de la nature, qui a parfois des caprices étonnants.
La hêtraie cathédrale
Ce paysage forestier de notoriété nationale et internationale risque d’être victime des conséquences du changement climatique. Les gestionnaires de la forêt veulent toutefois conserver une partie de ce paysage historique dans le meilleur état possible. Ils prennent un risque calculé avec le hêtre. Les cathédrales n’étaient pas un but en soi à l’origine, elles sont la conséquence du maintien sur pied de plus en plus long de hêtraies pures depuis le début du 20 e siècle, grâce à la résistance contre les grandes coupes à blanc, propre à la gestion forestière de l’époque. Espérons que l’on pourra maintenir quelques centaines d’hectares de ce type forestier et sa gestion caractéristique. On retrouve de beaux exemples de ces cathédrales dans la vallée du Vuylbeek, aux environs de l’hippodrome de Groenendael, au niveau de la chapelle de la drève de Willerieken et à Jezus-Eik.
La forêt
Nous avons déjà évoqué la hêtraie cathédrale. Les gestionnaires forestiers vont la maintenir et la régénérer sur quelques centaines d’hectares afin de conserver l’aspect paysager typique de cette essence à un âge de 120 ans environ.
Le hêtre restera l’essence principale à l’avenir mais il n’apparaîtra plus dans des peuplements forestiers équiens homogènes. Depuis 2005, il se régénère d’ailleurs massivement et pour la première fois, il pousse en semis pour former l’étage secondaire (la strate arbustive moyenne) de la forêt. Durant les décennies à venir, les jeunes hêtres vont modifier sensiblement l’aspect de la forêt aux endroits où ils se plaisent. En petits groupes, combinés à d’autres essences, qu’ils soient plantés ou non, ils vont former, moyennant une gestion adaptée, une forêt irrégulière et inéquienne (d’âges différents).
Par ailleurs, le Chêne sessile, avec plusieurs autres espèces d’arbres et de buissons d’accompagnement, va s’imposer progressivement en Forêt de Soignes. Cette essence est mieux armée pour faire face aux effets attendus du changement climatique, avec ses printemps plus secs et ses hivers plus humides. Elle grandira généralement avec la régénération naturelle du hêtre, et d’autres espèces d’arbres et de buissons indigènes. Si ceux-ci ne se sèment pas spontanément, il y aura des plantations ciblées.
Les hippodromes de Groenendael et Boitsfort, les étangs des Enfants Noyés, le Grasdelle, le Blankedelle, les étangs de Groenendael et les Etangs royaux, l’étang du Fer à cheval et la mare du Pinnebeek, les étangs du Rouge-Cloître et les prairies de l’arboretum de Tervueren sont autant de clairières importantes. Ces oasis de lumière permettent à des plans d’eau de s’installer, avec leur faune et leur flore souvent particulières. Les chauves-souris et les insectes ont particulièrement besoin de ces clairières, mais les plantes héliophiles (qui recherchent la lumière du soleil) aussi, telles que l’iris, symbole de la Région de Bruxelles-Capitale, privilégient ce genre de milieux.
Les anciens massifs de chênes de Boendael, autour du Rouge-Cloître et le long de la drève des Bonniers sont impressionnants de par les nombreux troncs volumineux, mais aussi en raison de leur valeur biologique exceptionnelle et de la flore vernale (printanière).
Les parcelles souvent anciennes de résineux assurent une alternance dans le paysage, de même que la faune et la flore typiques qu’on y rencontre. Les arboretums de Groenendael et de Tervueren sont célèbres dans le monde entier en raison de leur ancienneté (début du 20 e siècle), de la composition d’espèces et de l’objectif qui y est poursuivi. A Groenendael, le but était de tester des centaines d’espèces d’arbres et de buissons quant à leur aptitude à pousser dans nos forêts. A Tervueren, des massifs forestiers géographiques originaires de différentes régions ont été plantés : la partie ‘Nouveau Monde’ est franchement spectaculaire, mais le paysage en pente douce et les prairies ouvertes de cet arboretum sont aussi un régal pour les yeux.
Les lisières
Les lisières qui prennent progressivement de la hauteur (mousses, couche herbacée, buissonneuse et arbustive) assurent la transition vers la forêt fermée sur une largeur équivalent à une hauteur d’arbre et demie. Elles sont plus riches en espèces et sont visuellement attrayantes. En Forêt de Soignes, ces transitions sont généralement encore trop abruptes et offrent peu de valeur ajoutée pour la faune et la flore. Des changements vont certainement s’amorcer à ce niveau-là dans les prochaines années.
Les lisières assurant une transition entre les clairières et la forêt fermée feront l’objet d’une attention accrue. Un réseau de plusieurs dizaines de kilomètres de lisière sera créé et entretenu au cours des prochaines décennies. Le long des routes et du bâti, ces lisières apportent non seulement une plus grande biodiversité et un aspect plus attrayant, mais aussi une plus grande sécurité (chutes d’arbres). Une clôture aménagée dans les lisières qui longent le R0 et la E411 protège aujourd’hui les animaux du trafic et les empêche de provoquer des accidents. Les lisières ont pour effet de guider les chevreuils et autres animaux en direction des écoducs qui enjambent la ligne ferroviaire161 à Boitsfort et le R0 à Groenendael.
Les drèves
Ces alignements d’arbres, dont certains témoignent encore du passé de zone de chasse, participent incontestablement au pouvoir d’attraction du paysage. Plusieurs drèves seront régénérées au cours des décennies à venir. Des interventions radicales seront inévitables mais c’est un mal nécessaire pour arriver au résultat voulu : des vues rectilignes, souvent sur des kilomètres, conférant un aspect de cathédrale. Comme mentionné précédemment, l’image de la forêt va changer lentement mais sûrement au cours des décennies à venir.
Arbres remarquables
D’innombrables arbres remarquables ornent la forêt. Sur le territoire bruxellois, ils sont marqués d’un polygone bleu, visible à partir des sentiers de promenade. Ailleurs également, vous pouvez partir à la recherche de formes remarquables et d’arbres majestueux tels que le Beau chêne de la réserve forestière du Zwaenepoel, la charmaie remarquable du Grasdelle et le chêne Cosyn de la réserve naturelle du Rouge-Cloître. Les arbres les plus remarquables font l’objet d’une attention particulière au niveau de la gestion. N’y touchez pas et ‘ne leur marchez pas sur les pieds’. La compaction, même par des pieds très légers, est très mauvaise pour les arbres.
La forêt, bien plus que de simples arbres
Comme mentionné précédemment, l’image de la forêt va changer lentement mais sûrement au cours des décennies à venir. Les peuplements forestiers équiens (arbres du même âge) homogènes en Forêt de Soignes sont relativement pauvres en espèces et vulnérables. La richesse en espèces doit être augmentée pour atteindre les objectifs Natura 2000 et pour diminuer la vulnérabilité de la forêt. Pour cela, il faut des mesures spécifiques : des espèces plus mélangées, plus de bois mort, des arbres d’âge différent, l’aménagement de clairières permanentes et temporaires, le maintien d’arbres séculaires importants (souvent en groupes), etc. Avec les réserves forestières existantes, elles augmentent la biodiversité.
Les réserves naturelles et leurs clairières permanentes offrent une nature de grande valeur, sous la forme de prairies riches en espèces. Combinées à d’autres habitats dans les environs, elles constituent un réseau extrêmement important pour la nature de la Forêt de Soignes. Les nombreux microclimats différents qui y règnent favorisent une grande diversité d’espèces et créent un réseau de biodiversité.
Natura 2000 et la Forêt de Soignes
Natura 2000 est un réseau écologique européen cohérent de zones protégées, créé pour la préservation des habitats de grande valeur écologique, et abritant une faune et une flore rares. Les zones sont désignées en vertu de deux directives européennes : la directive Oiseaux et la directive Habitats. La directive Oiseaux protège l’avifaune sauvage, son environnement, ses nids et ses œufs. De son côté, la directive Habitats prévoit la protection d’habitats particuliers et d’espèces sauvages (faune et flore, hormis les oiseaux) d’importance européenne. Pas moins de 9 types d’habitat (hêtraie acidophile, hêtraie à flore vernale de Jacinthe des bois, chênaie-charmaie, aulnaie, prairie eutrophe, mare eutrophe, bruyères brabançonnes, chênaie-boulaie pauvre et landes sèches) sont présents ou développés et protégés dans la forêt. La présence de certaines espèces telles que le Lucane Cerf-volant (coléoptère), la Bouvière (poisson) et surtout quatre espèces de chauves-souris très rares (Grand murin, Vespertilion à oreilles échancrées, Vespertilion de Daubenton et Barbastelle) a été déterminante pour la désignation des zones.
Le statut Natura 2000 de la Forêt de Soignes garantit la préservation ou l’amélioration de ces habitats, et de leurs espèces animales et végétales caractéristiques. Il contraint les régions respectives à prendre toutes les mesures nécessaires à la protection et à la préservation afin d’assurer les habitats et la survie de ces espèces à long terme. Cela ne fait pas pour autant de la Forêt de Soignes une réserve naturelle fermée. Des activités humaines telles que des loisirs doux (promeneurs, cyclistes) et la sylviculture y restent possibles pour autant qu’elles ne mettent pas en danger, voire qu’elles puissent améliorer la préservation des habitats et espèces protégés. Certaines mesures prises pour protéger des zones Natura 2000 comme la Forêt de Soignes, sont financées par LIFE+, un programme de financement européen de projets en lien avec l’environnement et la nature.
La genèse de la forêt actuelle
L’aspect actuel de la forêt est dû à l’influence de l’homme. L’homme néolithique a déjà laissé des traces il y a 5000 ans, notamment dans des vestiges de combustion de charbon de bois et d’exploitation de minerais de fer. Ces activités ont eu un impact sur la couverture forestière et la composition des essences. Dès le 11 e siècle après J-C, le développement de la ville de Bruxelles a fortement influencé l’évolution de la forêt.
La hêtraie cathédrale
A la fin du 18 e siècle, sous l’occupation autrichienne puis française, l’architecte paysagiste autrichien, Joachim Zinner, fut chargé de ‘restaurer’ en grande partie la forêt ‘pillée’. Le hêtre fut l’essence de prédilection pour restituer à la forêt son allure d’antan. A l’origine, des centaines d’hectares de parties majoritairement en friche de la Forêt de Soignes ont été plantées avec cette essence. C’est à cette époque que remonte la prédominance actuelle du hêtre. Le système de gestion typique qui était appliqué aux parcelles à nettoyer était le “tire et aire”. De grandes coupes à blanc de plusieurs dizaines d’hectares d’arbres d’une centaine d’années en une fois constituaient à l’époque une forme de gestion normale, en préservant de 30 à 50 arbres par hectare. On retrouve des vestiges de cette méthode d’abattage un peu partout : une dissémination de hêtres et de chênes de grande à très grande envergure avec, en seconde couche, une hêtraie équienne. A la fin du 19 e siècle, l’opinion publique a commencé à s’insurger contre cette forme de gestion basée sur des coupes à grande échelle et radicales, et elle a fini par être abandonnée dès le début du 20 e siècle. Ces parcelles qui, à l’origine, étaient considérées comme bonnes pour l’abattage une fois les arbres devenus centenaires, ont été maintenues plus longtemps et éclaircies. C’est ainsi que l’on a obtenu cet aspect de cathédrale. Aujourd’hui, ces arbres ont donc entre 170 et 220 ans. A cet âge, ils commencent à décliner. Même sans intervention humaine, ce type de paysage est amené à disparaître lentement mais sûrement.
Les grands changements du 19è siècle
Au 18 e siècle, il subsistait encore 12.000 ha de la Forêt de Soignes. Aujourd’hui, elle ne compte plus que 5.000 ha. La Forêt de Soignes s’est donc réduite comme une peau de chagrin en peu de temps. La forêt a toujours été détenue par les souverains mais sous le Royaume Uni des Pays-Bas (1815- 1830), la Forêt de Soignes a été privatisée. Elle a été transmise à la Société générale qui, à partir de 1830, après l’indépendance de la Belgique, a vendu près de 60% du domaine. Bon nombre de nouveaux propriétaires ont exploité leur propriété et c’est ainsi que la forêt a perdu près de 2/3 de sa superficie en moins de 15 ans. A partir de 1843, la forêt a été rachetée progressivement par l’État belge. La gestion a alors été reprise par l’Administration des Eaux et Forêts. En 1983, la Belgique est régionalisée, et la Forêt de Soignes et sa gestion sont réparties entre les trois Régions du pays. Depuis, le complexe forestier est soumis à trois législations et à trois gestionnaires différents.